Retourner sur les bancs des (grandes) écoles
⏱ 5 min[vc_row][vc_column][vc_column_text]Les mastères spécialisés de data science restent une solution idéale pour se reconvertir ou évoluer. La formation qu’ils dispensent est particulièrement adaptée aux besoins des entreprises. Plus ou moins chers, plus ou moins sélectifs, ils sont néanmoins très exigeants.
« Je n’avais pas imaginé retourner en formation », reconnaît Laurent Gardès, qui a profité de son licenciement économique pour se faire financer un mastère spécialisé (MS) et se reconvertir. Aujourd’hui responsable du groupe d’Innovation & Recherche en intelligence artificielle (IA) à la SNCF, cet ingénieur de Télécom Paris avait travaillé vingt ans en architecture logicielle dans la télévision numérique. Quand, en 2017, la branche française de Cisco Video Technology, pour laquelle il travaillait, ferme en licenciant 200 cadres, il est au pied du mur… et saute le pas : « J’avais très envie de bouger, notamment de changer de domaine pour aller dans celui des transports, admet-t-il, mais tant qu’on est en poste, ce n’est pas si facile. J’envoyais des CV qui restaient sans réponse, ma candidature ne passait pas le filtre du robot de tri de CV ! Le financement proposé par Cisco (jusqu’à 30 000 € pour une formation diplômante dans le cadre d’un congé de reclassement de 13 mois) était une sacrée opportunité, l’occasion de se relancer, d’apprendre à faire autre chose. Une quarantaine d’entre nous en a profité. »
Retour d’expérience
Comment a-t-il choisi sa formation dans l’offre de plus en plus fournie (voir encadré ci-dessous) ? « En ce qui me concerne, le choix a été vite fait, lance-t-il : j’ai cherché sur le site de mon école. Le mastère spécialisé Smart mobility (Télécom Paris/École des Ponts ParisTech) ouvrait justement… il correspondait exactement à ce que je voulais ! J’aurais privilégié une formation à plein temps, mais je me suis adapté à son format en alternance (une semaine par mois). J’ai intégré le MS un peu dans la précipitation. Du coup, j’ai mis un peu de temps à trouver l’entreprise, la SNCF en l’occurrence. Mais tout s’est bien passé. »
Ce qui est sûr, c’est que ces auditeurs, comme on les appelle, sont très demandés, et n’ont pas de mal à se caser, les mastères spécialisés étant créés à la demande des entreprises. C’est souvent un véritable tremplin dans une carrière, sachant que certains de ces cursus sont à temps partiel pour pouvoir poursuivre son activité professionnelle. Malgré un coût élevé (environ 20 000 à 30 000 €), certains n’hésitent pas à se les payer sur leurs deniers personnels. « Ces mastères ouvrent des portes sur l’écosystème de la data science et le monde académique via les nombreux forums et rencontres ; cela nous permet de suivre la littérature scientifique sur ces sujets, de participer aux conférences, souligne Laurent Gardès. Il faut toutefois veiller à valoriser nos compétences professionnelles précédentes. Je ne souhaitais pas devenir un data scientist pur jus, mais la formation que j’ai choisie couvrait beaucoup d’aspects de la mobilité et les data sciences en faisaient naturellement partie. L’alternance m’a permis de mettre immédiatement en pratique ce que j’apprenais et d’être capable de me confronter aux data scientists et de comprendre ce qu’ils font. Aujourd’hui, je suis responsable d’une équipe qui compte 10 personnes. »
[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_cta h2= » »]
Un vaste choix de cursus très ouverts à la formation continue
Les mastères spécialisés (MS) sont des formations professionnelles labellisées par la Conférence des grandes écoles (CGE). Ce ne sont pas des diplômes d’État. Ils sont destinés aux étudiants de niveau bac + 5 en formation initiale ou en activité (parfois bac + 4 avec au moins trois ans d’expérience professionnelle). Créés pour répondre à la demande des entreprises, ils évoluent chaque année selon leurs besoins ; ils se caractérisent par leur enseignement pointu et leur haut niveau d’expertise, particulièrement apprécié des recruteurs. Les MS ont vocation à fournir des profils opérationnels.
Sur les 384 MS existants, 34 sont dédiés à la formation continue, 205 sont mixtes (formation initiale et continue) alors que 145 sont réservés à la formation initiale. On en recense 57 concernant l’informatique, le traitement de l’information et les réseaux, dont une partie porte sur la data science et l’intelligence artificielle. À bac + 6, ces cursus de 350 heures minimum permettent de se spécialiser dans un domaine pointu ou d’acquérir une double compétence. Le MS est validé après une soutenance de thèse professionnelle à l’issue d’un projet personnel de recherche mené en entreprise. Quant aux certificats, formations plus ciblées et moins longues, ils sont en général accessibles en situation de travail et sont ou non éligibles au Compte personnel de formation (CPF). Enfin, c’est plus rare, certaines personnes choisissent de reprendre une formation en master (diplômes d’État bac + 5).
Voici quelques écoles qui proposent des formations continues en science des données : Télécom Paris (MS Big data, MS IA, formations continues en IA et big data), Polytechnique (Data Science starter program), Centrale Supélec (MS Management des systèmes d’information, MS Cybersécurité, MS Mathématiques appliquées à la finance), Mines Paristech (MS Management stratégique de l’information et des technologies), l’ENSAE (MS Data science), l’ENSAI-ENSAE (Certificat Data analyst, Certificat data scientist), Dauphine PSL (certificat Data science), l’Insa (MS Cybersécurité du numérique), Ponts et Chaussées (MS Design by data), l’INP Toulouse (MS Valorisation des données massives).[/vc_cta][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]
Cas d’école
Prenons l’exemple de Télécom Paris. « Nous avons créé le MS Big Data à Télécom-Paris il y a huit ans, dans le but d’accompagner la transformation digitale des entreprises et de valoriser les données qu’elles captent, se rappelle Stephan Clémençon, qui en est responsable. Son programme n’a fait que croître avec l’avènement de techniques de plus en plus pointues comme l’apprentissage par renforcement en machine learning, la visualisation des données, les aspects sécurité, l’IoT ou encore la prise de parole pour présenter des projets : il compte désormais 800 heures sur 15 mois, dont 9 mois de cours et 6 mois de thèse. Il faut dire que les techniques et les besoins évoluent très vite en data science, c’est presque hystérique ! »
Un gros tiers de l’effectif choisit ce cursus exigeant après cinq à dix ans en entreprise pour devenir data scientist, un petit tiers est en reconversion, notamment pour accéder à de nouvelles responsabilités, plus stratégiques comme Chief Data Officer ou pour mettre en place un système d’informations, et un tiers sont des étudiants issus de la formation initiale qui cherchent une spécialisation. « Il ne faut pas se leurrer : c’est brutal pour ceux qui sont en reconversion, reconnaît-il. D’où l’importance de la qualité de notre recrutement et du Mooc qu’ils doivent valider au préalable ( lire l’article 1 de ce dossier « L’autoformation en data science par les Mooc » ). Cette disparité de niveau est complexe à gérer, certains auditeurs étant par ailleurs plus à l’aise en maths, d’autres en informatique, d’autres en gestion de projets opérationnels complexes. Nous faisons vivre l’interdisciplinarité et le travail en équipe dans le cadre de projets (sur 1,5 jour par semaine à partir du 2e trimestre) sur des problèmes réels proposés par les entreprises avec leurs données, éventuellement leurs infrastructures de calcul. Cela peut aller jusqu’au POC. Les livrables sont sur Github. »
En même temps que le MS Big data, l’école a mis sur pied un Certificat d’études spécialisées (CES) data scientist : 26 jours de formation à raison de 2 jours par mois pour des stagiaires en situation d’emploi et une évaluation à travers un projet avec des données de leur entreprise. Plus récemment, un CES IA a été créé et cette année un MS Intelligence artificielle monté avec l’ENSTA Paris pour traiter des aspects robotique, de l’interaction homme-machine, du traitement du langage…
« Ces formations sont très dures à suivre, mais elles relancent les carrières, affirme Stephan Clémençon. Cela permet de reprendre le train en marche, d’être au fait de l’état de l’art et capable de suivre les évolutions en matière de recherche. Sachant que la lutte pour les talents confine parfois à l’hystérie : il faut moins de 2 semaines à nos étudiants pour trouver un stage, un CDD ou un CDI, certains changent même en plein stage s’ils sont déçus… C’est néanmoins beaucoup plus dur à 45 ans, en situation de reconversion qu’à 30 ou 35 ans. » Mieux vaut une reconversion au sein de son entreprise.
Isabelle Bellin
[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]