Édouard Pauwels :
Un mathématicien en quête d’optimisation pour l’IA
⏱ 3 minMaître de conférences à Toulouse, Édouard Pauwels mène des recherches à l’interface entre les maths et l’informatique au sein de l’IRIT. Sa spécialité ? L’optimisation pour les réseaux de neurones profonds, ce qui lui a valu de recevoir en 2020 la médaille de bronze du CNRS.
Rien ne prédestinait Édouard Pauwels à devenir maître de conférences en mathématiques appliquées à l’université Toulouse III – Paul Sabatier et chercheur à l’Institut de recherche en informatique de Toulouse (IRIT). Sauf peut-être son goût prononcé pour les maths, depuis son enfance…
Issu d’une famille de médecins, qui l’orientent plutôt vers des études d’ingénieur, et « aucune envie de métier » dans le viseur, ce jeune parisien (son patronyme lui vient d’un grand-père flamand) passe d’abord un bac S, puis s’engage vers une classe préparatoire pour intégrer l’école Mines ParisTech en 2006. Mais, toujours pas inspiré une fois diplômé, il décide finalement de bifurquer… vers la recherche. « Contrairement à aujourd’hui, cela ne se faisait pas beaucoup à l’époque, raconte-t-il. Mais je me suis dit, pourquoi ne pas essayer une thèse en lien avec les mathématiques appliquées, car cette matière semblait me correspondre. »
De la bio-informatique à l’optimisation numérique
L’essai, sous forme d’un stage de six mois au Centre for Computational Biology, une unité mixte portée par les Mines et l’Institut Curie, est une révélation : « J’ai tout aimé : le contact avec l’équipe, la recherche en elle-même et la possibilité d’apprendre beaucoup. » Sa directrice, Véronique Stoven – une biologiste – lui propose alors de poursuivre par un doctorat. Son sujet ? Le machine learning appliqué à la bio-informatique. Après une remise à niveau de ses connaissances en cancérologie et en génétique, il mène avec succès ses recherches et soutient sa thèse en décembre 2013.
Que faire ensuite ? Logiquement un post-doctorat. Mais Édouard Pauwels n’a pas envie de poursuivre en bio-informatique… Il amorce alors un second virage. « Pendant ma thèse, j’utilisais l’optimisation numérique et, en dernière année, j’avais commencé à me former tout seul sur ce domaine, qui est davantage tourné vers les maths, explique-t-il avec passion. Cela m’a permis de rencontrer Jérôme Bolte, professeur à l’université de Toulouse, avec qui j’ai commencé à travailler sur ce sujet. » Ce dernier le met en relation avec une équipe d’automatique et d’optimisation toulousaine au Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS-CNRS), qui l’embauche pour un post-doctorat de neuf mois.
Enseignant-chercheur en mathématiques appliquées
Mais pour espérer avoir un jour un poste permanent, un séjour post-doctoral à l’étranger est fortement recommandé. Autre coup de pouce de Jérôme Bolte, qui le recommande auprès d’une équipe renommée en optimisation, basée en Israël. Pendant cette année de post-doctorat, il garde en tête l’objectif de revenir ensuite à Toulouse, où vit sa compagne.
Au printemps 2015, il tente alors sa chance et candidate à plusieurs concours dans la recherche publique et privée. Résultat ? Il est retenu pour un poste de maître de conférences à l’université Paul-Sabatier, qu’il accepte, soulagé. Désormais enseignant-chercheur – ce qu’il n’avait pas envisagé au départ – il n’est pas mécontent d’enseigner les statistiques, l’optimisation ou encore l’apprentissage profond : « C’est une activité très saine qui permet à la fois de rester en contact avec le monde étudiant et de se renouveler constamment. »
Une expertise reconnue dans les réseaux de neurones profonds
Ses recherches, il les mène au sein de l’équipe ADRIA, à l’IRIT, sur des algorithmes d’optimisation numérique utilisés pour l’apprentissage automatique et, en particulier, pour les réseaux de neurones profonds. « De nombreuses questions échappent à notre compréhension dans ce domaine en pleine explosion, explique-t-il. Ce sont justement ces « trous théoriques » que j’étudie depuis quelques années, et qui vont encore m’occuper longtemps. » L’ensemble de ses travaux, et notamment sa publication1 dans la revue Mathematical Programming, lui ont d’ailleurs valu de recevoir, en 2020, la prestigieuse médaille de bronze du CNRS, parmi une quarantaine d’autres chercheurs.
Aujourd’hui, à 35 ans, il est également chercheur associé à l’Institut de mathématiques de Toulouse (IMT), et mène au total une dizaine de collaborations avec d’autres chercheurs, parmi lesquels Jérôme Bolte, qui pilote la chaire Large Scale and Optimization AI, de l’Aniti (Artificial and Natural Intelligence Toulouse Institute), l’Institut interdisciplinaire d’intelligence artificielle (le 3IA) toulousain, dont il est un chercheur permanent. Une activité « florissante sur une thématique très dynamique », dit-il en toute humilité, et dans laquelle il se réjouit surtout d’avoir une totale liberté.
Laure Blancard
1. Jérôme Bolte, Édouard Pauwels. “Conservative Set Valued Fields, Automatic Differentiation, Stochastic Gradient Method and Deep Learning”, Mathematical Programming, Springer Verlag, 2020. ⟨hal-02521848⟩
Crédit photo : IRT Saint-Exupéry