Faut-il un datalab pour innover dans la data ?
⏱ 5 min[vc_row][vc_column][vc_column_text]La création de labs, structures dédiées à l’innovation, est à la mode depuis quelques années. La data science, en ce qu’elle porte de disruptif, d’interdisciplinaire et de véloce, est un domaine d’innovation où ces nouvelles façons de travailler semblent particulièrement adaptées. À condition que le datalab s’inscrive dans une réelle vision de transformation digitale de l’entreprise.
De manière générale, un « lab » favorise l’émergence d’idées disruptives, en isolant des projets incertains pour les porter sans perturber l’organisation existante, et les laisser grandir sans que l’entreprise ne les « tue » : telle est la définition donnée dans une tribune de Harvard Business Review par Olivier Laborde, directeur innovation et transformation digitale de Natixis Assurances, créateur de labs depuis une dizaine d’années. Il identifie au moins six objectifs pouvant justifier la mise en place de telles structures : cela va de la prospective à l’acculturation en passant par l’open innovation.
La science des données a-t-elle besoin de datalabs ?
« La data science doit résoudre des problèmes complexes et interdisciplinaires, les décisions à prendre sont souvent hebdomadaires, note Robert Marino, responsable pendant six ans d’une business unit à la société d’accélération de transfert technologique IDF Innov. Il est intéressant d’utiliser les méthodes agiles pour s’adapter en permanence aux besoins du client, avec des cycles de décision courts. Pour cela, il faut absolument créer des ponts entre ceux qui ont les besoins, travaillent sur les données, les comprennent, et ceux qui développent les algorithmes. »
Même constat chez EDF R&D, qui a créé son Data Innovation Lab en janvier 2017 : « Si la data introduit un changement, c’est moins dans l’émergence de nouvelles compétences que dans la manière de travailler avec les autres, affirme, dans une interview donnée à Paris Saclay le Media, Nadège Vignol, pilote stratégique du dispositif. Cela passe par la création de nouveaux espaces de travail, de lieux propices aux échanges, au partage. » Elle résume les objectifs du Data Innovation Lab en deux mots : accélérer et décloisonner.
Une conciergerie de la data
« Nous avons ouvert le datalab, une structure de 400 mètres carrés (m²) dans notre siège social, à Niort, en janvier 2018, à la suite d’une réflexion engagée depuis un an avec tous les acteurs de la data à la MAIF, précise Olivier Baes, responsable du dalalab de la MAIF. Sa mission est triple : d’abord l’anticipation, pour rester au fait des évolutions en data science et en intelligence artificielle (IA) et nous aider à sélectionner nos cas d’applications et d’expérimentations. Pour cela, le datalab fait le lien entre les écosystèmes interne et externe, des start-up proposant des produits de valorisation data, nos pairs et bien sûr nos équipes de recherche, tant sur les sujets métiers qu’éthiques et technologiques. Il permet aussi d’ouvrir le débat clé sur la data dans tout le groupe. Deuxième mission : accélérer l’expérimentation des solutions via des POC (Proof of Concept ou preuve de concept) et des MVP (Minimum Viable Product ou produit à fonctionnalité réduite) en testant rapidement tel ou tel point, avec un minimum de formalisme, avec la seule volonté de soutenir les porteurs de projets dont les cas d’application portent une valeur identifiable ou à démontrer. Le datalab est une sorte de « conciergerie de la data » : il favorise les liens entre data scientists et acteurs métiers, et doit devenir un lieu de rencontre naturel. Troisième mission : l’accompagnement de la transformation digitale de la MAIF à tous les stades via des conférences, l’animation de communautés, la communication interne. »
Pour toutes ces raisons, le groupe a créé un territoire « un peu neutre », très ouvert et accessible, avec une forte connotation créative. Outre une salle de conférence d’une capacité d’accueil de 30 à 40 personnes et une cafétéria, le datalab dispose d’un open space, inspiré des espaces de travail Wework au style flashy : de nombreux écrans présentent les projets en cours, des espaces de réunion dans des salles vitrées, équipées de canapés et de tables en bois, jouxtent quelques bureaux. « Cet univers spécifique doit favoriser le partage, l’échange, l’installation d’équipes à la journée », résume Olivier Baes.[/vc_column_text][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_gallery type= »image_grid » images= »13389,13391,13392,13390″ img_size= »medium »][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]
Une usine à innover autrement
On retrouve un peu les mêmes raisons d’être à la Digital Factory d’Air France. « Nous avions besoin d’un espace de créativité pour faciliter la veille et accélérer la réalisation de projets de data science en réponse aux demandes métier, explique Sophie Troël, responsable de la Digital Factory. Ce lieu concrétise nos valeurs en matière d’innovation digitale agile. Il doit permettre d’aider à définir les problématiques, de favoriser les collaborations transverses entre les data scientists, l’équipe IT et les métiers. Il doit aussi favoriser la réflexion globale selon une approche agile et non séquentielle comme auparavant dans nos projets IT. » Design thinking, coworking, idéation, MVP, sprint sont les nouveaux mots d’ordre.[/vc_column_text][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_cta h2= » »]
À quoi ressemble la Digital Factory d’Air France ?
Créé en moins d’un an et inauguré le mois dernier, ce lab est un ensemble de 14 containers installés sur 2 niveaux dans la cour du siège social de la compagnie aérienne : 350 m² au rez-de-chaussée avec un showroom pour présenter les projets en incubation ; une salle de créativité sans bureau, avec des alcôves et de grandes fenêtres pour créer une ambiance cosy ; enfin un espace en gradins pouvant accueillir de 30 à 40 personnes. À l’étage, 4 salles d’environ 30 m² sont destinées à accueillir les projets sélectionnés, pendant environ 4 mois, dans le but de favoriser l’échange entre les data scientists et les experts-métiers (on peut écrire sur tous les murs), ainsi qu’un grand plateau pouvant accueillir 15 à 30 personnes, avec des alcôves et au centre une « cage en verre » pour trouver le silence, ou au contraire se réunir.
[/vc_cta][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_gallery type= »image_grid » images= »13393,13394,13429″ img_size= »medium »][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]« Nous testons notre nouvelle méthode de travail depuis début 2018, dans des lieux temporaires jusqu’à présent, explique Sophie Troël. Nous avons déjà mené une quinzaine de projets, et nous venons de livrer notre première solution. Nous avions tous hâte de travailler dans ce nouvel espace. » Un espace censé être modulaire et éphémère dans l’idée qu’une fois la transformation digitale menée, la méthode diffuse dans l’entreprise afin que de tels lieux se multiplient naturellement. « D’ici cinq ans », avance-t-elle.
Un lieu pour prendre des risques
Une des finalités soulignées par Olivier Laborde dans la mise en place de telles structures est effectivement de permettre de travailler avec de nouvelles méthodes, selon un mode agile : « Le lab devient ainsi une « usine à innover autrement« avec le souhait de changer de culture. Il joue le rôle d’un « incubateur interne« qui facilite l’émergence de projets innovants au sein de l’entreprise. Il permet d’explorer des marchés, d’éprouver des technologies et de valider de nouveaux business models tout en protégeant ces projets de rupture contre les obstacles, voire l’hostilité de l’organisation existante. Autrement dit de prendre des risques que l’entreprise ne prend plus. »
Attention néanmoins à ce que ce lieu s’inscrive bien dans une transformation culturelle de fond de l’entreprise. « Je ne crois pas à ces structures si les seules propositions de valeur sont des couleurs flashy sur les murs, une imprimante 3D et un baby-foot,caricature Robert Marino. Il faut une vision de l’innovation dans l’entreprise et une véritable délégation de pouvoir, il est nécessaire d’accepter, par exemple, qu’il n’y ait plus de reportings classiques. Or, il n’y a pas forcément besoin de structure pour cela. On doit surtout récompenser ceux qui prennent des risques, essaient, même si cela n’aboutit pas. Sans pour autant pousser à la prise de risque – l’entreprise a également besoin de data scientists qui ne soient pas des têtes brûlées –, mais surtout sans l’entraver. »
En matière de transformation digitale exemplaire, il cite l’exemple de DBS, une banque singapourienne plusieurs fois récompensée à ce titre. Elle a mis en place de nombreuses initiatives pour faciliter l’innovation et repenser la banque en profondeur : « Cela ne se limite pas aux technologies que nous utilisons, l’innovation est dans notre ADN, martèle Piyush Gupta, CEO et directeur de DBS Group. Cela se reflète dans notre façon de travailler. » Le groupe s’est lancé dans un vaste programme de transformation digitale, d’acculturation du personnel et de restructuration de son infrastructure technologique. Ces bouleversements passent par des centres d’apprentissages créés pour former le personnel aux technologies les plus récentes, par un programme de soutien aux start-up (le Hotspot), des hackatons, ou encore des stages pour étudiants en licence ou master (Uni.Corn), quelle que soit leur discipline. L’espace de créativité DBS Asia X, inauguré fin 2016, est dans cette ligne d’open innovation, et accompagne la transformation digitale du groupe. C’est un espace collaboratif entre des start-up et la communauté des technologies fintech pour réimaginer, inspirer et créer l’avenir de l’innovation. La data science semble bel et bien figurer à la pointe de l’innovation.
Isabelle Bellin
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