Un traitement de données embarqué
⏱ 4 min[vc_row][vc_column][vc_column_text]Si elle veut poursuivre son essor, la robotique devra relever un défi de taille : parvenir à optimiser les puissances de calcul embarquées, tout en garantissant la sécurité des données traitées.
Outre ceux évoqués dans nos pages ces dernières semaines, les robots doivent gérer un autre défi technologique important : parvenir à embarquer la puissance de calcul nécessaire au traitement des nombreuses données qu’ils doivent collecter pour fonctionner correctement. « Les développements de la robotique restent aujourd’hui limités par la puissance de calcul embarquée, confirme Philippe Bidaud, directeur scientifique du domaine « Traitement de l’information et systèmes » à l’Onera et ancien responsable du GDR Robotique du CNRS de 2010 à 2014. Mais les recherches vont bon train pour l’augmenter toujours plus. » Pour ce spécialiste, la piste la plus prometteuse reste le développement d’architectures dites « many-cœurs » capables d’intégrer des centaines de processeurs sur une seule puce. Plusieurs sociétés telles Nvidia et Kalray conçoivent aujourd’hui des processeurs pour ces architectures many-cœurs. « Certains sont déjà développés pour réussir à embarquer du SLAM sur des robots [voir article 1 « S’intégrer à l’environnement« , ndlr] « , complète Philippe Bidaud.
Un casse-tête permanent
« Mais quels que soient les progrès en matière de processeurs (CPU, GPU, etc.), la puissance embarquée sera toujours limitée pour éviter de surcharger le robot ou faire exploser sa consommation électrique, estime pour sa part Rodolphe Gelin, directeur scientifique chez SoftBank Robotics qui développe les robots humanoïdes NAO, Pepper et Romeo. Avec une question d’architecture qui se pose sans arrêt : comment partager de manière optimale les ressources informatiques entre celles embarquées sur le robot et celles qu’on laisse sur le cloud ? » Par exemple, les robots de SoftBank Robotics recourent à une reconnaissance vocale stockée sur un cloud comme Siri sur les smartphones… mais ils disposent aussi d’une reconnaissance vocale de secours embarquée. Objectif ? Toujours pouvoir répondre à leur interlocuteur en cas de perte du WiFi.
« Mais pour des raisons évidentes de sécurité en cas de perte du réseau, certains traitements de données sont forcément embarqués tels les logiciels permettant au robot de se maintenir en permanence en équilibre », complète Rodolphe Gelin. Par ailleurs, certaines tâches stratégiques pour le robot peuvent nécessiter des processeurs supplémentaires dédiés. « Sur notre robot Keecker, le système permettant au robot de ne pas tomber dans l’escalier dispose par exemple d’un processeur pour lui tout seul « , illustre par exemple Pierre Lebeau, CEO de la société éponyme. Mais on ne peut pas non plus embarquer des puissances de calcul trop importantes car cela peut aussi poser des problèmes de bruit à cause des ventilateurs nécessaires pour les refroidir. » Et même certains robots relativement lourds n’embarquent pas tout leur traitement de datas. Exemple ? Le robot voiturier Stan de la société Stanley Robotics capable de garer tout seul des voitures. « Stan pèse plusieurs centaines de kilos : il embarque donc de la puissance de calcul, mais aussi un système de connectivité permettant au besoin de déporter des calculs dans l’infrastructure tel l’appel à des API externes », confirme Aurélien Cord, CTO chez Stanley Robotics.
Sécuriser les datas embarquées
D’autre part, à l’avenir, de plus en plus de robots devraient interagir avec des humains, et donc collecter des informations sur eux… autant de données qu’il faudra protéger contre les risques de fuite, de vol et de piratage. La sécurité passe aussi par la protection contre des hackers qui pourraient prendre à distance le contrôle du robot, par exemple pour blesser son propriétaire. « Même si cela complique le software et alourdit les calculs, il nous faut absolument relever ces défis de sécurité sous peine de voir l’essor de la robotique sérieusement freiné : le grand public n’acceptera pas d’acheter des robots passoires ! », concède Rodolphe Gelin de SoftBank Robotics dont des robots avaient été piratés à distance par des experts. Depuis, la société a amélioré leur système d’exploitation, elle intègre divers outils de protection tel le cryptage des communications… et se rapproche de sociétés spécialisées dans ces domaines comme Symantec.
Les développeurs d’applis sous contrôle
Tous les roboticiens semblent très concernés par ces problèmes de sécurité et de confidentialité des données récoltées par leurs robots. « Keecker fonctionne sous Android qui a déjà sa plate-forme de gestion de sécurité, la connexion est sécurisée et les données anonymisées en amont avant d’arriver sur le serveur », précise par exemple Pierre Lebeau. De plus, les utilisateurs de Keecker qui le souhaitent peuvent faire supprimer leurs données stockées sur les serveurs de la société; et chaque fois que le robot met en route sa caméra, une LED rouge s’allume sur lui … de quoi prévenir la personne dans le champ qu’elle est filmée. « La protection des données personnelles est aussi un sujet important chez Stanley Robotics : nous effectuons une anonymisation systématique des données de nos clients », ajoute Aurélien Cord.
Les fabricants doivent aussi s’assurer que les éventuelles applis de prestataires installables sur leurs robots soient également protégées. En effet, tous comme nos smartphones, certains robots pourraient avoir à télécharger différentes applis du type « accueil de clients en magasin », « aide aux personnes âgées », etc. Or si ces applis sont infectées par des virus malveillants, elles pourraient pirater le système d’exploitation central du robot. Les fabricants vont donc sans doute imposer des cahiers des charges très stricts en matière de sécurité aux sociétés souhaitant développer ces applis… Heureusement, dans ce domaine, la robotique bénéficie des nombreux progrès déjà obtenus sur ordinateurs et smartphones.
Jean-Philippe BRALY
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