De l’open data city à la smart city
⏱ 6 min[vc_row][vc_column][vc_column_text]Ouvrir les données des villes… et après ? Pour quels usages d’utilité publique ? Comment les favoriser ? Comment partager les données d’intérêt général entre acteurs publics et privés ? Peut-on piloter les villes avec ces données ?
« On ne sait pas qui utilise les données en open data, reconnait Benoît Chabrier, délégué régional au numérique à la préfecture d’Occitanie. Par principe, les données étant ouvertes, on peut juste connaitre le nombre de téléchargements de chaque jeu de données. » « Par exemple, les données budgétaires sont très largement consultées et téléchargées mais on ne sait pas pour quel usage, poursuit Bernadette Kessler, responsable du service innovation numérique de la métropole de Rennes. Ces données sont très peu exploitées, au sens propre, pour l’instant. Les associations et la population manquent encore cruellement de culture du numérique en général et de la donnée en particulier. »
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Répartition des dépenses d’investissement et de fonctionnement dans le budget 2018 de Rennes Métropole
© OpendataSoft
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Mettre les données en scène et de façon intelligible
Ouvrir les données ne suffit pas à susciter leur usage et les retombées économiques restent souvent difficiles à évaluer. « Il faut créer du récit avec les données, les faire parler à coup de datavisualisation, de cartographies, de graphes, » insiste Bernadette Kessler. Le portail open data de Rennes métropole, présenté sur une plateforme OpenDataSoft, est probablement parmi les plus avancé en la matière. « Il faut éditorialiser les données pour montrer leur intérêt, ajoute-t-elle, à l’instar de la carte du stationnement (voir ci dessus) de la ville, des informations sur la circulation et les travaux (voir illustration en Une), sur les habitants de Rennes Métropole (sexe, âge, profession, moyens de transport utilisés, diplôme, logement, etc.), sur les trajets en vélo ou les résultats des élections de 2017 (voir ci-dessous). Ces cartes ou applications sont produites par la métropole, par des entreprises ou des individus. »[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_empty_space][vc_single_image image= »12548″ img_size= »large » alignment= »center »][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]
Résultats du premier tour de l’élection présidentielle 2017 avec précisions par bureau de vote
© OpendataSoft
[/vc_column_text][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]« Les collectivités comprennent désormais que les tableaux de bord les plus impressionnants avec des cartes qui clignotent ne servent à rien, confirme Jean-Marc Lazard d’OpendataSoft. On privilégie la simplicité en illustrant les indicateurs importants pour chaque ville de façon intelligible par tous : par exemple, la ville est au-dessus ou au-dessous d’un objectif à atteindre en % d’électricité d’origine renouvelable, information que l’on peut détailler en zoomant sur une carte. » Le but aujourd’hui est bel et bien de mieux valoriser la donnée pour améliorer le service public et mieux informer le citoyen comme le résume très bien cette vidéo sur le Grand Lyon.
Comme le rappelle la CNILCommission nationale de l’informatique et des libertés dans un récent rapport sur les smart cities, ces villes dites intelligentes ne se feront pas sans smart citizens, gage d’une démocratie plus participative et de l’empowerment des citoyens. Ça commence tout doucement. « Cela passe par de la médiation avec des visualisations simples ou des espaces de coconstruction des villes numériques comme Tuba à Lyon, ajoute Jacques Priol, fondateur de Civiteo, société de conseil aux collectivités. C’est un enjeu majeur pour favoriser l’usage de la donnée par les villes, les citoyens, les entreprises. »
Rendre la donnée publique brute intelligible par tous est au cœur du projet Dataclic, mené en Occitanie, un des onze projets Investissements d’avenir sur l’open data des territoires. Deux solutions sont prévues : un géoportail de l’urbanisme pour centraliser les contraintes liées à l’urbanisme de façon simple pour que chaque citoyen ait accès facilement à cette information sur le Plan d’occupation des sols (POS) ; un outil indiquant l’accessibilité de tout un chacun aux services publics (écoles, médecins, hôpitaux mais aussi boulangeries, distributeurs de billets ou pompe à essence).
Améliorer les services publics
Autre grande question des data cities : comment favoriser le partage des données publiques et privées ? Rennes a fait le choix, précurseur, de créer un Service public métropolitain de la donnée (SPMD), autre projet Investissements d’avenir : « Notre ambition est d’identifier les producteurs de données d’intérêt territorial, publiques et privées, et de partager toutes ces données pour produire ou améliorer des services publics, explique Bernadette Kessler. Concrètement, nous voulons étudier les conditions techniques, économiques, juridiques dans lesquelles nous pouvons partager des données entre acteurs privés, publics ou associatifs. Nous travaillons sur 4 thématiques (la mobilité, l’énergie, l’eau et les données sociodémographiques). Par exemple, sur la mobilité, nous souhaitons travailler avec PSA, Siemens, Bolloré, SNCF, Orange et Keolis, les 6 partenaires d’in Out, un événement dédié à la mobilité numérique à Rennes organisé en mars, en lien étroit avec notre partenaire la Fabrique des mobilités. » Le but est que ces partenaires définissent les modalités de partage de leurs données et mesurent l’intérêt de se rapprocher d’utilisateurs potentiels, de startups, d’entreprises autour de nouveaux usages. Des startups qui n’attendent que ça comme au Breizh Data Club qui regroupe les data lovers de l’Ouest !
« Les gestionnaires des villes vont apprendre à explorer et tirer parti des données des villes comme le font déjà bon nombre d’entreprises comme les GAFAGoogle, Apple, Facebook, Amazon avec un tas d’autres données à des fins commerciales », confirme Jean-Marc Lazard d’OpendataSoft qui a, par exemple, passé des accords avec Waze comme à Lille pour avoir accès aux données de l’opérateur GPS de transport, en temps réel en échange d’informations prévues comme des évènements sportifs, des travaux ou des brocantes qui impactent la circulation. Cela permet d’ajuster les choix de circulation ou les interventions des équipes de voirie en tenant compte de la circulation réelle. En moyenne, Waze connait les signalements d’accidents 4 minutes 30 avant les services de police et de secours… « C’est un vrai changement culturel, ajoute-t-il : la donnée brute, non prémâchée, devient la matière première. Un nouveau métier émerge, que j’appelle data hunter, tourné vers la finalité, la capacité à exploiter le potentiel d’un réservoir de données disponibles en changeant d’angle de vue pour trouver de nouveaux usages. »
Exemples : détecter des logements vacants grâce à des données énergétiques, gérer l’éclairage public en mesurant la fréquentation des piétons ou des voitures, gérer les tournées de collecte de déchets et l’installation de conteneurs selon les besoins locaux, exploiter des données des grandes surface pour améliorer les politiques de santé publique, etc. « L’étude des conditions de partage des données publiques avec celles des nombreux acteurs privés comme Orange, Waze ou EDF est à l’agenda de 2018 », affirme Jean-Marie Bourgogne, délégué général d’OpenDataFrance, l’association publique qui accompagne les collectivités dans l’open data, sachant que le règlement général européen pour la protection des données (RGPD, voir article DAP) entrera en application en mai prochain. Ces notions de données d’intérêt territorial, de collaboration avec les acteurs du numérique, de service public local de la donnée sont détaillées dans le rapport sur les smart cities du député Luc Belot (avril 2017). Elles sont aussi au cœur du programme DataCités (programme du cabinet d’études et de prospective Chronos et du collectif dédié à la société collaborative Ouishare, tous deux associés dans le lab).
Piloter la ville
L’ultime objectif pour certains comme Google est de piloter la ville à partir de ses données, l’avenir selon le géant américain en termes de qualité de vie et d’écologie. C’est ce qui se prépare à Toronto (Canada) où Sidewalk Labs, la filiale d’Alphabet (maison-mère de Google) dédiée aux smart cities, conçoit tout un quartier en agrégeant les données récoltées sur ses habitants, leurs déplacements, leurs activités, sur des mesures environnementales, sur la gestion de l’eau ou des déchets. Un quartier géré par les données, sur le modèle de Songdo (Corée du Sud), smart city ultraconnectée. En France, sans commune mesure, parmi les expérimentations en cours, citons Dijon qui ambitionne, d’ici à la fin de l’année, avec Bouygues Energies & Services et Suez, de piloter des équipements connectés de l’espace public des 24 communes de la métropole (feux de circulation, éclairages, vidéoprotection, services de voirie, etc.) dans un unique poste de pilotage en temps réel.[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_empty_space][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_cta h2= » »]
Sunrise : un démonstrateur de réseaux urbains « smarts »
« Cela ne sert à rien d’avoir des milliers de capteurs et des terabytes de données. Créer une smart city n’est pas un problème technique mais de gouvernance », martèle Isam Shahrour, directeur du LGCGE et responsable du projet SunRise-Smart City, un démonstrateur grandeur nature sur quartier de abritant 25 000 habitants, près de 150 bâtiments et 100 km de réseaux urbains. Ce démonstrateur de réseaux urbains (eau et énergie), c’est le campus de l’Université de Lille ; les données analysées sont celles des bâtiments, des installations d’eau potable, d’assainissement et des équipements divers ainsi que celles issues de capteurs (sur la qualité de l’eau, les débits, pressions, température, etc.). « Notre but, en croisant toutes ces données, est de mieux gérer les ressources et les infrastructures, explique-t-il. Nous avons ainsi pu identifier des fuites dans le réseau d’eau et économiser des fuites allant jusqu’aux 300 m3/jour ou encore constater un dysfonctionnement entre les réseaux d’eau pluviale et des eaux usées). » Sur la base de cette expérience, bien plus simple qu’une ville en termes d’organisation avec un seul acteur aux commandes (l’université) et une base de données unique, Isam Shahrour accompagne des villes dans leur démarche vers la smart city. « Il faut commencer par un diagnostic presque exhaustif des services fournis par la ville et des problèmes identifiés dans ses divers systèmes, résume-t-il. Il faut ensuite définir des priorités et alors seulement, un plan d’instrumentation de la ville. La smart city ne doit pas être un objectif en soi mais une démarche d’amélioration continue et collective faisant bon usage des données. »[/vc_cta][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]
Isabelle Bellin
Pour aller plus loin
Conférence le mardi 20 mars 2018
DONNÉES PUBLIQUES, DONNÉES PRIVÉES, QUEL(S) MODÈLE(S) POUR LA DATACITÉ ?
Journée coorganisée et animée par Olivier DEVILLERS, Consultant en transformation numérique, NETLOCAL
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